mercredi 7 octobre 2020

Là d'où je viens a disparu, Guillaume poix


                                            Littérature française  


"Là d'où je viens a disparu" de Guillaume Poix, éditions Verticales, est, à mon sens, l'un des meilleurs romans, avec "L'anomalie d'Hervé le Tellier et "Avant les Diamants" de Dominique Maisons, de la rentrée de l'automne 2020.


En 2017, Samuel, jeune congolais âgé de six ans, et sa mère Véronique se noient à la suite du naufrage du bateau chargé de leur faire traverser la Méditerranée au départ de l'Espagne à destination du Maroc. Quelles douleurs se cachent-elles dans ce roman ?


"On pourrait déployer toute une fiction autour des faits sèchement énoncés, imaginer les voyages et les péripéties, tracer les destins, combler les trous..." (P.188). Hélène, personnage du roman, est la démonstration profonde de la quintessence de l'œuvre essentielle de Guillaume Poix. Les textes de Poix, romans, pièces..., sont toujours un terrain propice à une remise en cause Politique et inconfortable de notre monde inquiétant et menaçant et son propos s'accorde systématiquement et intelligemment à l'évidence.

Michel BLAISE ©


Chavirer, Lola Lafon


                                            Littérature française

La structuration du roman de Lola Lafon, "Chavirer", (Acte Sud) est très désordonnée, susceptible de ruiner l'intérêt du roman. Par ailleurs, le thème abordé, essentiel évidemment, ne me parait plus - je dis bien plus compte tenu de pléthore d'écrits dans ce domaine - adapté au roman. le récit ou le témoignage sont plus appropriés.
Car, au fond, le roman, qui permet tout, banalise, par définition, un sujet aussi grave. Je n'ai donc pas été convaincu pour, essentiellement, ces défauts majeurs par le roman de Lola Lafon, du lu et relu à l'envi en ce moment.

Michel BLAISE ©

Les évasions particulières, Véronique Olmi


                                        Littérature française

Le roman de Véronique Olmi, Les évasions particulières, Albin Michel, présente incontestablement de nombreuses qualités. La "première partie" est très intéressante. Le fait qu'il s'agisse d'un récit sur une époque déterminée n'est pas un handicap, bien au contraire, surtout lorsque celle-ci est particulièrement et méticuleusement approfondie. Mais au fur et à mesure de la lecture, la promesse de départ n'est pas tenue : l'orientation historique crée de nombreuses confusions et approximations certainement en raison d'un défaut d'architecture du récit, articulée tel un catalogue - de personnages en personnages, d'histoires en histoires - sans aucune perspective intéressante et approfondie quant aux personnalités ou évènements. Le récit manque en matière de travail des protagonistes essentiellement.

Michel BLAISE ©

Fille, Camille Laurens

                                                Littérature française

Le livre de Camille Laurens, "Fille", Gallimard, est, à mon sens, l'échec de la rentrée littéraire 2020. Il ne s'agit pas d'un roman, mais d'une succession et d'enchaînements de "souvenirs" - est-ce d'ailleurs, au fond, un roman, une autofiction (?) dans lequel, je ne suis pas sûr que beaucoup de jeunes filles d'alors se soient reconnues. C'est un peu agaçant ces écrits, baptisés romans qui tendent à raconter la vie de l'auteur afin de régler ses comptes avec la vie. Le livre est uniquement concentré sur la personne de son auteur animé d'un égo démesuré et agace rapidement avec, bien entendu, l'éternelle tarte à la crème des différence de traitement entre les petites filles et les petits garçons. Est-ce productif pour un roman  ? Je ne le pense pas.

Michel BLAISE ©                                  

jeudi 17 septembre 2020

Dix petits nègres, Agatha Christie




                                                           

                                                           Whodunit - Policier


Dix petits nègres "débaptisés".

Agatha,

Au fond, cette décision ne t’aurait pas choqué. Toi, qui, aussi bien dans ta vie personnelle que d’écrivain, n’as cessé de tricher. D’abord avec les codes du roman d’enquête : "le meurtre de Roger Ackroyd", le coupable ne doit jamais être le narrateur ; « le crime de l’Orient express " : on ne doit jamais, dans un whodunit, mettre en scène plusieurs coupables (ici, en l’occurrence, ils le sont tous) ; de même que les domestiques ne sont jamais des assassins, alors que souvent tu as usé et abusé du procédé.

Bref, chère Agatha, il semblerait... que ton arrière-petit-fils aurait autorisé, sans pression..., la modification du titre de ton roman, "Dix petits nègres ". Eh oui, on récolte toujours ce que l’on sème, même au fin fond de l’éternité.

L’hypocrisie et la malice, que tu as toujours fort bien mises en scène, notamment un jour lorsque mystérieusement et lâchement tu disparus, te rendent visite par-delà les morts.

Mais tu étais une femme libre, Agatha.

À ces traits, ajoutés à la trahison du whodunit par la violation de ses codes les plus élémentaires, que reste-t-il de toi ? : ton livre, peut-être le plus populaire, travesti par des ayatollahs de la pensée – « couvrez ce sein que je ne saurais voir » -, au profil de ceux, lobotomisés, qui, déjà depuis longtemps, ne savent plus penser et réfléchir !

Au fond, je dois les remercier, Agatha. Je réfléchissais au un titre de mon roman à paraître dans quelque temps. Le voici : « Dix petits nègres  » Celui-ci n’est-il pas libre, désormais ? Et de mon vivant, nul ne le débaptisera.

C’est une chronique quelque peu funèbre, Agatha. Certes. Mais avec la dépouille des soldats de l’an II, ceux de la résistance, de Colbert, de Jean Jaurès, de Picasso ou de Stefan Zweig et de tant d’autres - hommes et femmes politiques, résistants, poètes ou écrivains, mais tous épris de liberté -, je te souhaite de reposer en paix, Agatha.

Michel BLAISE ©


NB : Tous ceux qui agissent ainsi, qui agitent le spectre du racisme - que je n'ignore pas - sans en connaitre le sens exact sont les artisans d'un mouvement hygiéniste et indigéniste, mais qui sont racialistes eux-mêmes qui, malheureusement, excitent les masses incultes Parce que, dans ces conditions, c'est toute la littérature mondiale, pour ne citer que cet art et, plus particulièrement, la littérature française, qu'il faut réécrire : que penser de Flaubert qui, dans madame Bovary, emploi à l'envi le mot "nègre" et qui fait dire au personnage de" Lleureux" " Nous ne sommes pas des juifs".??.. Ces gens sont incapables de replacer les choses dans leur contexte parce qu'ils ne connaissent rien.

De bonnes raisons de mourir, Morgan Audic



Policier - Thriller

                            Voir la critique de Kirzy sur Babelio


 

Voici bien plus qu'un formidable polar.


La région de Tchernobyl, trente ans après l'effroyable catastrophe du 26 avril 1986, est devenue une attraction pittoresque. À Pripiat - ville à jamais désertée, toute proche du fatal réacteur numéro 4 de la centrale nucléaire - sous le regard épouvanté de tout un bus bondé de touristes baltes et occidentaux, l'inspecteur Joseph Melnyk et sa partenaire, Galina Novak, fraiche émoulue de l'école de police, décrochent le corps d'un homme suspendu à la façade d'immeuble. Dans le bâtiment, Melnyk découvre de nombreux oiseaux récemment empaillés. La victime, Léonid Sokolov, est le fils d'un ancien ministre ukrainien des années 1980. Ce dernier, richissime et exilé en Russie, a une confiance limitée dans la police de Kiev. Aussi, il s'approprie, à grand renfort de dollars, les services l'inspecteur de police moscovite, Alexandre Rybalko, afin qu'il trouve l'assassin de son fils. C'est donc parallèlement que les deux policiers vont enquêter sur cette terre dévastée et d'exclusion de Tchernobyl sur laquelle tout est interdit et « permis », en même temps : pillages, trafics ou violences en tout genre.

Ce polar est absolument génial. D'abord, deux hommes très différents, aussi bien par leur histoire que par leurs motivations, mais également fascinants, attachants et intenses. Mais surtout parce que cette « chasse » en terrain défendu est fascinante et saisissante de réalisme, je vous jure que c'est la pure réalité : la zone d'exclusion et ses habitants clandestins, l'affolement perpétuel des compteurs Geiger, le pillage des habitations abandonnées, le trafic du matériel irradié, des poupées d'enfant désarticulées que l'on trouve encore sur le bitume, des chiens errants, dont on se demande ce qui leur reste de domestique et si l'on ajoute à tout ça un tueur cinglé et empailleur, l'on obtient « de bonnes raisons de mourir » de Morgan Audic (Albin Michel,2019).

 

         Michel BLAISE ©

        

          


 

vendredi 3 juillet 2020

La patiente, Jean-Philippe Mégnin


Intrigue psychologique - homosexualité


« C'est dès le premier échange de regards que je compris que ce ne serait pas une patiente ordinaire… ». C'est ainsi que débute le roman de Jean-Philippe Mégnin, « la patiente ».


Lorsque Vincent, gynécologue, introduit une patiente habituelle dans son cabinet, il remarque, dans la salle d'attente, la présence d'une femme, totalement inconnue, sans aucune expression sur le visage, attendant patiemment son tour.


À cet instant, Vincent comprend que la consultation suivante ne sera pas comme les autres et que, sans nul doute, sa vie est sur le point de basculer. Il est saisi d'un sentiment inexprimable, d'un mauvais pressentiment ; durant, toute la consultation qui précède, il est transi de peur.
Son instinct était juste ; la séance ne fut pas ordinaire avec La Patiente, Camille.


À la fin de la visite, avant de quitter le cabinet, Camille se retourne et pose cette seule question à Vincent :

« Gynécologue, c'est un choix professionnel un peu étrange, pour un homosexuel, non ?


Lors de sa parution en 2010, aux éditions le Dilettante, le livre de Jean-Philippe Mégnin « la patiente » fut brièvement mentionné par François Busnel sans La Grande Librairie. C'est un petit ouvrage de 157 pages, mais débordant de qualité - l'écriture, naturellement -, distrayant par son intrigue - quoiqu'il ne soit pas question un instant de roman policier – et très riche d'enseignements socio-psychologiques.


Il n'appartient pas au genre de la nouvelle ; il s'agit d'un roman. Toute comparaison gardée évidemment, on est frappé par l'ambiance, contemporaine, propre aux meilleurs nouvellistes à l'image, par exemple, de Guy de Maupassant, par la volonté d'une mise en perspective, dans un récit simple et concis, de tout un univers sociologique, psychologique ou encore géographique. Jean-Philippe Mégnin est saisissant d'esprit d'observation et d'analyse.


À travers une intrigue psychologique finement menée, l'auteur aborde divers sujets tels que l'Amour, la fidélité, la famille, la culpabilité. Mais ce qui est remarquable et que l'on retient en définitive au-delà de l'anecdote, c'est, peut-être, celui du sens de la vie et, plus particulièrement, de nos actes. de la propension de l'Homme à se comporter bien ou mal, étudiée par les plus grands philosophes (KantNietzsche, notamment), de considérer l'amour comme un acte altruiste ou égoïste par essence.


Il s'agit d'une vaste question que soulève l'auteur dans ce roman, celle de l'Amour : l'Amour désintéressé ou bien égoïste à l'instar de Narcisse qui vit son reflet dans l'eau d'une source et tomba amoureux de sa propre image et se suicida par suite de cette révélation ?


Est-ce à dire que Camille est condamnée à se suicider ? Il est difficile de répondre ici à cette question car d'autres sont abordées dans le roman dont je conseille vivement la lecture. Il offre une réflexion très intéressante sur bien des interrogations.


Bonne lecture.

Michel.

jeudi 11 juin 2020

L'intelligence collective, Joseph Henrich






« C'est la culture qui nous rend intelligents » (Joseph Henrich)

Ils sont innombrables les ouvrages sur l'intelligence humaine comparée à celle de l'animal (l'éthologie). Mais rares sont les auteurs, comme Joseph Henrich qui a compris et démontre magistralement que ce n'est pas parce que « l'Homme est un animal raisonnable » (Aristote) qu'il dispose de tous les outils, méthodes ou savoir-faire. C'est parce qu'il a culturellement développé un large répertoire d'outils, de concepts, de savoir-faire et de méthodes qu'il est intelligent.

C'est, au fond, la culture qui le rend intelligent. Celle-ci s'accumule au fil des générations et, au bout du processus, on finit par envoyer une fusée sur la Lune.

Henrich, qui dirige le département de biologie évolutive humaine de l'université Harvard, illustre son propos de façon très convaincante.

« Les racines de manioc contiennent du cyanure. Or, dans les Amériques, des sociétés qui s'en nourrissent depuis des millénaires, elles ne présentent aucun cas d'intoxication. Pourquoi ? Parce qu'elles ont mis au point des techniques complexes de transformation, comportant des étapes nombreuses et qui peuvent paraitre fastidieuses … Une fois isolé, ce liquide est mis à bouillir et transformé en boisson ; les fibres et l'amidon sont mis de côté pendant deux jours supplémentaires … Un individu peut être tenté de simplifier cette longue procédure et se contenter, par exemple, de faire bouillir le manioc. Or si cela réduit l'amertume et empêche les symptômes aigus, cela n'élimine pas suffisamment le cyanure et on s'expose à une intoxication chronique. Souvent, la plupart voire la totalité des individus qui manifestent un grand savoir-faire dans l'application de ces pratiques adaptatives ne savent ni comment ni pourquoi elles fonctionnent.
Cette opacité causale de nombreuses adaptations culturelles a des effets très importants sur notre psychologie : nous sommes programmés pour avoir foi dans le savoir qu'on nous transmet. »

Ainsi, la prochaine fois que vous direz « ok gogole » (Google, pour les puristes) à votre smartphone, pensez à Joseph Henrich et à ses travaux.

Je conseille l'excellente interview de l'auteur dans le magazine « Books », juin 2020 n°108.

Bonne lecture,


Miche BLAISE ©



mardi 9 juin 2020

En lieu sûr, Ryan Gattis



                                                             Policier-Thriller




Dès le début du livre, je compris que Ryan Gattis n'est pas un auteur inepte, mais que « En lieu sûr », son dernier ouvrage édité, en France, par fayard et tout récemment par Le livre de Poche - sélectionné pour concourir pour Prix de Lecteurs 2020 - ne me plairait pas.

Mais faisant contre mauvaise fortune bon cœur – le temps est de l'argent – et cédant à ma détermination de cesser toute lecture ne me procurant ni plaisir, ni érudition, les deux à la fois autant que possible, je décidai de lire le livre jusqu'au bout.

Sur le fond : après la lecture de « 3 secondes » de Roslund et Hellström, une histoire d'infiltré, ou presque, était la promesse d'une lecture séduisante. Mais, il ne suffit pas d'inventer une histoire, même bien fichue ou efficace - j'émets quelques réserves, cependant, sur ce point – pour faire un bon livre.

La forme : et oui la forme ! Parce que trop d'auteurs de romans policiers pensent pouvoir s'en affranchir pour rendre un bon roman policier pensant de telle façon que celui-ci serait le pauvre de la littérature.

Est-ce à dire que « en lieu sûr » est mal écrit ? Pas exactement. Rien de comparable avec les niaiseries ou insipidités de quelques auteurs au succès une fois l'année (Guillaume MussoMarc Levy) ou tous les 10 ans (Joël Dicker). Mais « merde », « ta gueule » toutes les 10 lignes, toutes les 3 pages, des phrases psychédéliques construites sans un sujet, un verbe et un complément – plus particulièrement lorsque le narrateur choisit une focalisation interne à la première personne – je ne supporte plus et, «toussa, toussa », ruine mon plaisir de lecture.

Puisqu'il faut décider d'une note, mais que je ne suis pas professeur « es qualité d'un ouvrage », celle-ci ne reflètera que ma seule opinion.

Je ne déconseille pas ce livre, mais je ne le recommande pas.

Bonne lecture.

Michel BLAISE ©

samedi 9 mai 2020

La vie des abeilles, Maurice Maeterlinck

            
                              abeilles - éthologie - écologie - philosophie




L'ouvrage de Maurice Maeterlinck, réédité par les éditions Archipoche, le 9 janvier 2020, est essentiellement écrit d'un point de vue philosophique et éthologique suivant une prose magnifique.



Il demeure un classique indispensable pour qui s'intéresse aux abeilles et a conscience que leur disparition annoncée augure la fin de l'humanité bien avant l'extinction du soleil dans quelques milliards d'années (autrement dit, sur une telle échelle, là, maintenant, le temps de lire cet avis), si nous persistons à détruire cet insecte indispensable.




Pour une meilleure connaissance sur la vie et l'organisation des abeilles, je recommande l'ouvrage "Vie et mœurs des abeilles" de Karl von Fristch, ainsi que l'émission culte de J.C Ameisen, sur France Inter, "Sur les épaules de Darwin" ; le podcast, l'apiculteur aveugle, est toujours disponible, ici




Bonne lecture et bonne écoute.


Michel BLAISE. ©

vendredi 8 mai 2020

Malamorte, Antoine Albertini








                                                                                                            Policier





En Corse, près de Bastia. Mohamed Cherkaoui tire sur sa femme et sa fille de cinq ans. Celles-ci sont mortellement touchées. Puis, il tente, en vain, de suicider. Qui, par ailleurs, assassine, sur le sentier des Crêtes, plusieurs randonneuses ?

De retour sur son île natale, affecté au BHS - le Bureau des Affaires Simples - en conséquence d’une sanction disciplinaire, un obscur capitaine de police sans nom ni prénom, le narrateur enquêteur, agit en solitaire pourchassé par un passé assidument présent, et s’efforce d’élucider les deux enquêtes nonobstant la condescendance de ses collègues et le peu de disposition de la hiérarchie à son égard dans une oasis de compromissions, de trafics d’influence et de corruptions commis aussi bien par d’importants entrepreneurs que par le pouvoir exécutif et l’administration policière locaux.


Toutefois en raison de liens affectifs, persuadé de ses compétences professionnelles, Lou Girardi, chef de la section criminelle, impose le capitaine pour enquêter sur ces crimes. C’est au prix d’une détermination inébranlable que celui-ci confondra les coupables au moyen de solutions parfois peu orthodoxes.


Mais sur l’ile de beauté, les coupables aussi bien que les innocents demeurent parfois fort marris…

mardi 24 mars 2020

Dix petites poupées, B.A Paris

   
                                                Triller psychologique

Méfiez-vous des apparences en particulier quand l'auteur d'un thriller teste sur le lecteur et ses personnages une «mise à l'épreuve »...


Layla et Finn sont en couple depuis un an. En 2006, de retour de Megève - pour l'Angleterre où ils résident – Layla disparait soudainement et étrangement sur une aire d'autoroute française.



Finn, soutenu dans ce moment difficile et hébergé par son ami Harry, noue quelques relations amoureuses éphémères jusqu'à sa rencontre, en 2013, chez Harry, avec Ellen, la sœur de Layla, qu'il n'avait jamais rencontrée auparavant. La relation est sérieuse ; ils déménagent ; une date de mariage est arrêtée après un an de vie commune.



Mais alors que Layla a disparu depuis douze années, celle-ci semble réapparaitre : un ancien voisin dit l'avoir aperçue près de l'ancien domicile conjugal ; sa sœur, Ellen, prétend l'avoir reconnue, et le couple trouve ou reçoit par la poste des poupées gigognes à l'image de celles appartenant aux deux sœurs depuis leur enfance.



Layla est-elle de retour ? que veut-elle ? En toute hypothèse, tout porte à croire qu'elle aurait mis en place un scénario diabolique pour se venger. Mais de qui et pourquoi ?



Le roman, « Dix petites poupées » (Lien Babélio), publié en France aux éditions Hugo Thriller, est le troisième roman de B.A Paris. Le 2 avril 2020, son nouveau roman, « le dilemme ». sera édité au livre de poche.



D'origine Franco-Irlandaise, l'auteur vit à Paris. Ses deux précédents romans sont : « derrière les portes » (Lien Babélio) et « défaillances » (Lien Babélio) traduits à plus de deux millions d'exemplaires.



Je suis demeuré très dubitatif après la lecture des deux ouvrages précités et force est de constater que B.A Paris privilégie les thrillers conjugaux. Pourquoi pas.



Mais, à moins de ne jamais lire de policiers ou de thrillers, je n'imagine pas, qu'à la moitié de la lecture de «dix petites poupées », l'on ne devine pas la solution de l'intrigue ; le suspense est faible.



En outre, le récit lent et laborieux.


En bref, c'est un bon petit thriller pour débutant.     

Bonne lecture,

Michel BLAISE ©                                

lundi 16 mars 2020

Propriétés privées, Lionel Shriver

     
                                              Littérature américaine - Nouvelles



« le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez stupides pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile … » proclame Rousseau dans son discours sur l'origine et le fondement de l'inégalité parmi les hommes. le philosophe du XVIIIe siècle n'observait aucune relation entre propriété et communisme ; son propos n'était que l'affirmation d'un esprit libertaire.


Envisagée à l'aune de la continuation et de la continuité de l'oeuvre balzacienne, Lionel Shriver croque dans « Propriétés privées », sans compassion ni jugement, le spectacle de la Comédie humaine propre au désir irrépressible d'appropriation et de possession lorsque celui-ci confine à la dépendance et à l'obsession et, en définitive, contraint l'Homme moderne occidental et révèle ses viles et douloureuses émotions.

Née en 1957 aux États-Unis, Lionel Shriver a enseigné avant de partir pour la découverte du monde. Elle a vécu en Israël, à Bangkok, à Nairobi et en Irlande du Nord, où se situe l'ultime histoire du livre.

À mi-distance de la nouvelle et du roman, « Propriétés privées » est publié en février 2020 aux éditions Belfond. Lionel Shriver est également l'auteur de six romans dont « Il faut qu'on parle de Kevin » (Belfond, 2006), récompensé par l'Orange Prize, et de « La famille Mandible, 2029-2047 » (Belfond, 2017). Elle vit aujourd'hui à Londres, mais également à New York avec son mari Jeffrey Lawrence Williams, jazzman réputé.

Douze nouvelles sarcastiques, dont deux Novella – le pied en lustre et la sous- locataire - dont le dénominateur commun est l'exposé des mécanismes psychologiques d'appropriation des biens et d'emprise sur autrui, sous toutes ses formes. Et en filigrane, cette interrogation : de l'Homme ou de la chose lequel domine l'autre ?

Il y en a pour tous les goûts. Et d'aucun ne pourra nier, pour autant les incertitudes et les contingences afférentes au monde contemporain, se reconnaitre, au moins une fois, dans l'une ou l'autre des situations décrites.


Novella « le lustre en pied » - un présent de mariage – est éclairante. Une épouse exhorte son mari à rompre toute relation avec une amie de longue date. Celle-ci exige de reprendre le cadeau offert, mais se heurte au refus de la mariée.

dimanche 23 février 2020

Dans son silence, Alex Michaelides

    
                                             Thriller psychologique

Je n'ai pas lu, depuis le livre  (..., ...) (1), un roman policier ou un thriller aussi bien que celui-ci. De plus en plus, dans la littérature policière "moderne", il faut attendre la fin pour découvrir une intrigue qui tienne la route, et l'on s'ennuie, plus ou moins, le reste du temps.

Alex Michaelides, dans cette première fiction, est prodigieux : l'intrigue qui est le support de son premier roman publié et traduit en français est exceptionnelle, magistralement orchestrée et dirigée avec une fin époustouflante.
Un auteur, qui je l'espère, se manifestera de nouveau rapidement.

Bonne lecture.

Michel.

1) j La référence à ce roman est susceptible de dévoiler un élément essentiel de l'intrigue de "Dans son silence"

Monsieur Anatole, Philippe Alessandri

                        Littérature générale - roman psychologique - intrigue




« Monsieur Anatole », cinquante ans, est un modeste employé de banque exemplaire et sans histoire à l'image du commun des mortels. Pourtant - taciturne et solitaire, misanthrope et aigri (il aime voir les gens malheureux, P.9), mégalomane et narcissique, accro au porno et voyeur, maniaque, perclus de contradictions et tourmenté ; toutefois élégant et raffiné autant que grotesque et ridicule - cet individu est un criminel. Il relate avec cynisme les circonstances qui l'ont conduit à commettre ses méfaits. Alors même que ses meurtres sont impulsifs, et consécutifs à de banales circonstances et encore typiques du crime imparfait, cet olibrius ne rend jamais compte de ses actes à la justice. Comment cela est-il possible ?



« Monsieur Anatole » est le personnage éponyme du premier roman de Philippe Alessandri publié aux éditions La Trace. Il convient de souligner la qualité des romans de cette maison d'édition : la couverture, toujours illustrée par la reproduction de magnifiques peintures - ici « le Marquis d'Alfredo » d'après l'œuvre de Lempicka (1926) de même que la qualité remarquable du papier sont autant de détails qui accroissent le plaisir de la lecture. Les éditions « La Trace » favorisent la qualité des auteurs et des récits à leur quantité.


Il y a des livres qui font le succès des « rentrées littéraires », dont certains nous délectent - d'autres beaucoup moins – et puis il y a ceux dont on parle moins. « Monsieur Anatole » fait partie de ces derniers, mais c'est un très bon roman.


Sur le mode à la première personne avec pour narrateur le personnage principal, « Monsieur Anatole », Philippe Alessandri écrit une fiction aboutie et passionnante. Le prétexte du roman pourrait sous-entendre que «Monsieur Anatole » est un récit policier. L'auteur orchestre et conduit le suspense d'une d'intrigue de manière totalement captivante ; jusqu'au terme du roman l'on se demande où celui-là veut nous emmener. Philippe Alessandri ne déçoit pas. Et si quelques digressions peuvent sembler surréalités, elles sont totalement inhérentes à l'histoire. Mais n'allons pas trop vite…


Les meurtres « en série » de Monsieur Anatole » ne sont que des prétextes à une tentative d'approche au plus profond de l'âme humaine, d'incursions dans les méandres de son inaccessible immensité, bref d'une immersion au plus profond de l'intelligence et de la pensée humaine.


Car, au fond, cette fiction est au cœur même de l'Homme pour qui consent, un tant soit peu, à l'introspection. Philippe Alessandri avance au plus près de l'esprit humain en permettant au lecteur, après la lecture de la dernière ligne, de méditer ceci : « je ne suis tout de même pas monsieur Anatole !  ?  » … (Note personnelle).


Certains questionneront la justesse du présent avis, l'auteur lui-même peut-être – Philippe Alessandri pardonnera que sur lui je renchérisse - mais force est de constater que celui-ci explore, d'un point de vue saugrenu, un sujet bien plus sérieux de ce qui pourrait paraître une simple farce. Et c'est très habilement conçu. La lecture du roman est un régal – drôle, intrigant et captivant de bout en bout. Et assurément, l'auteur n'est pas avare de scènes et de dialogues burlesques et ubuesques lorsqu'il met en scène le personnage, haut en couleur, de Monsieur Anatole.


Celui-ci est d'une construction admirable. Il est le contraste parfait du héros attendu d'un roman traditionnel que l'auteur réussit à connecter intelligemment avec les autres personnages, eux-mêmes, parfois, des antihéros à leur manière : Monsieur Anatole élimine son maître chanteur parce qu'elle s'est tout simplement moquée de son chapeau et non en raison de l'intimidation exercée ; ou encore sa jeune maitresse (sa voisine de palier) à la suite de ses moqueries quand il perd en elle sa semence «presto rapidos » …


L'on saisit immédiatement alors la perspective romanesque de l'auteur : Monsieur Anatole, prisonnier de ses délires, est l'ambassadeur d'individus ratés, ce que nous serions tous si notre propension, profondément enfouie, n'était pas réfrénée à la faveur du discernement, de l'éducation ainsi que des conventions et règles sociales.


À partir de ce constat, Philippe Alessandri ne pouvait que provoquer l'intérêt du lecteur, retenir son attention et susciter une forte identification inconsciente à l'égard de Monsieur Anatole, ce personnage mystérieux qui cache sans cesse quelque chose que seule la fin du livre révèle. À aucun moment, l'on ne reste passif et l'on participe activement à l'histoire. Ce personnage dissimule quelque chose et l'on veut découvrir de quoi il s'agit. C'est un des tours de force de ce roman.


L'auteur emploie un autre procédé romanesque efficace en mettant à nu les deux visages de l'inénarrable Monsieur Anatole. En effet, le lecteur recherche à s'identifier dans un roman. Il y consent avec Monsieur Anatole, mais il peut cacher un tel processus à sa morale.


La morale de Monsieur Anatole


Les délires de Monsieur Anatole ne sont pas uniquement la cause des meurtres commis à l'occasion de réactions impulsives, mais ils révèlent aussi une personnalité ambivalente et insaisissable. À la fois réservé et raffiné, en même temps grotesque et folklorique, Monsieur Anatole suscite continuellement des effets comiques.


Par exemple, il n'avait jamais rencontré sa jeune voisine de palier ; le soir, il espionnait les bruits à travers la cloison commune avant de se masturber devant un film pornographique. Mais un jour- il est chez elle depuis quelques minutes - il doit effectuer un gage suite de la perte d'un pari :

— « Tu veux que je te masse, que je te fasse des trucs comme ça…  » ?...

— « Mieux que ça ! Un strip-tease, tu vas me faire un strip-tease !

— Moi, te faire un strip-tease à toi…  !

— Allez, hop ! En piste ! Fais le strip-tease comme il faut, hein ? Faut que ce soit émoustillant.  !  »…

Imaginez un peu la scène : un type de cinquante ans faire un strip-tease à une fille d'une vingtaine d'années. Cela devait payer… Effectivement cela payait…

— « Allez, enlève le haut… Trémousse-toi plus lentement… Putain, si mes copines me voyaient qu'est-ce qu'elles marreraient…  !  »

Elle s'amusait comme une folle… Je sentais la gêne m'envahir, puis la honte. Je songeais à mes collègues qui, s'ils avaient vu le tableau, auraient eu un sacré choc… Monsieur Anatole, l'employé-modèle, se livrant à la débauche devant une gamine qu'il connaissait à peine…

Elle voulait la suite. Le strip-tease intégral. En suivant le rythme lancinant de la musique, je me retournais et ôtais mon vieux slip rouge, à l'élastique trop mou…je pris une décision brutale…je me retournais d'un coup.

— « ouh là là… Midi pile ! Vieux cochon, va…  » (P.21, 22, 23).


Les dialogues et le récit en général n'en sont donc pas moins savoureux et en totale harmonie avec l'esprit du roman et de son héros. L'écriture, à la réserve des dialogues propres à dépeindre certaines situations ou personnages, est parfaite : châtiée sans être ampoulée, limpide et agréable. Mais surtout, Philippe Alessandri est encore de ces écrivains modernes qui savent écrire des phrases composées d'un sujet, d'un verbe et d'un complément… Voilà au moins un point d'accord entre l'auteur et le narrateur, Monsieur Anatole :

« Je me mis à lire énormément. Je dévorais des livres par douzaines… Plutôt de la littérature classique que des auteurs contemporains que je trouvais trop égotistes.
J'appréciais davantage les phrases longues des écrivains du dix-neuvième et de la moitié du vingtième siècle, au subjonctif admirable, que celles en style télégraphique que l'on trouve aujourd'hui dans la plupart des bouquins…  ». (P. 89).


C'est avec conviction que je recommande vivement la lecture de ce livre. Non seulement parce qu'il est intelligent, passionnant, drôle et bien écrit, mais, de manière générale, pour la qualité des récits publiés par les éditions La Trace (1).


Bonne lecture,

Michel.


1) Ex : "Nous nous sommes tant aimés", par Mona Azzam